En cours d’exécution d’un marché de travaux publics, il n’est pas rare que des travaux supplémentaires soient réalisés sans un ordre de service ou un avenant préalable par l’entreprise titulaire. Au moment de se faire payer, cette dernière rencontre parfois de grandes difficultés.
L’arrêt du Conseil d’Etat du 27 mars 2020
Dans cet arrêt, le Conseil d’Etat rappelle que le titulaire d’un marché public peut obtenir paiement de travaux supplémentaires « indispensables aux règles de l’art », bien que réalisés sans commande écrite préalable. Néanmoins, il refuse dans le présent cas d’indemniser le titulaire, aux motifs que le maître de l’ouvrage s’est opposé à leur réalisation au préalable. (https://www.conseil-etat.fr/fr/arianeweb/CE/decision/2020-03-27/426955)
Le département de LOIRE ATLANTIQUE conclut un marché à prix unitaire avec une société de géomètre. Le titulaire, ayant réalisé des travaux complémentaires sans avenant préalable, présente une réclamation avec son projet de décompte final. Le département rejette cette demande. Le titulaire saisit alors le tribunal administratif pour obtenir la condamnation de la collectivité à lui verser les sommes réclamées.
Le Conseil d’Etat rejette la demande du titulaire aux motifs d’une part, que le titulaire ne démontrait pas le caractère indispensable des travaux réalisés et d’autre part, que le Département l’avait informé de sa volonté de ne pas rémunérer lesdits travaux supplémentaires avant leur réalisation.
« le prestataire a le droit d’être indemnisé du coût des prestations supplémentaires indispensables à l’exécution du marché dans les règles de l’art, sauf dans le cas où la personne publique s’est préalablement opposée, de manière précise, à leur réalisation ».
Or, le département avait, avant la réalisation des travaux, fait connaître sa volonté de ne pas rémunérer les prestations supplémentaires fournies sans commande expresse.
Rappel du principe
En matière d’indemnisation de travaux supplémentaires, il est fortement déconseillé au titulaire d’un marché public de réaliser des travaux, sans avenant préalable.
Ceci étant rappelé, la jurisprudence administrative reconnaît néanmoins au titulaire d’un marché à forfait le droit au paiement de certains travaux supplémentaires réalisés sans commande écrite.
Exceptions jurisprudentielles
Outre les cas de travaux supplémentaires réalisés en raison de sujétions techniques imprévues, qui doivent bouleverser l’économie du contrat, ou représenter une augmentation du coût du marché a minima de 12-13 % environ selon la jurisprudence, les tribunaux administratifs ouvrent droit à indemnisation, sans seuil minimum, lorsque les travaux réalisés sont indispensables à la bonne exécution de l’ouvrage suivant les règles de l’art. https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriAdmin.do?idTexte=CETATEXT000030591954
La jurisprudence est venue illustrer le caractère indispensable de certains travaux, à savoir :
– La réalisation d’un fourreau d’un diamètre supérieur à celui prévu au marché, suite aux préconisations d’EDF en cours de chantier.
– La préconisation par l’organisme en charge de l’étude de sol, d’un système de fondation différent de celui initialement retenu, à savoir l’ancrage par plots au lieu de semelles filantes. https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriAdmin.do?idTexte=CETATEXT000033222477
Les travaux indispensables à la réalisation de l’ouvrage selon les règles de l’art sont alors indemnisés dans leur intégralité par le maître d’ouvrage.