Les litiges de travaux publics présentent un caractère périlleux pour les praticiens, notamment lorsque, défendant un intervenant à la construction dont la responsabilité est recherchée devant la juridiction administrative, il faut envisager les différents recours en garantie. En la matière, on peut être tenté de vouloir de faire juger ces recours en garantie par le juge du principal plutôt que de multiplier les instances devant différentes juridictions, notamment lorsque l’on a connaissance des délais de procédure, généralement en décalage par rapport aux contraintes de trésorerie de nos clients.
Néanmoins, une grande prudence s’impose.
En effet, il est constant que le litige né de l’exécution d’un marché de travaux publics et opposant des participants à l’exécution de ces travaux relève de la compétence de la juridiction administrative, sauf si les parties en cause sont unies par un contrat de droit privé (T. confl, 24 nov. 1997, n°03060, publié au Bulletin)
Le juge administratif est dès lors compétent, soit lorsque l’action contentieuse trouve son fondement dans les stipulations de celui-ci, soit lorsque les protagonistes, ayant participé à l’opération de travaux publics, ne sont pas liés entre eux par un contrat de droit privé. Les actions en cause peuvent être soit des actions directes, soit des appels en garantie.
Ainsi les litiges entre l’entrepreneur et l’architecte, alors même que l’un et l’autre sont des personnes privées, relèvent de la compétence administrative (T. confl. 20 nov. 1961, Garreau c/ Elkouken), sans qu’il soit besoin que l’un et l’autre soient liés au maître de l’ouvrage par un contrat administratif (T. confl. 24 nov. 1997, Sté de Castro, req. n°03060 ), tandis qu’un litige opposant un entrepreneur à son sous-traitant ou à son fournisseur, liés par un contrat de droit privé relève de la compétence judiciaire (T. confl. 15 janv. 1973, Sté Quillery-Goumy c/ Sté chimique routière et d’entreprise générale et Sté bretonne de travaux publics,).
Il est également constant que ce sont les juridictions judiciaires qui sont compétentes pour connaître des actions tendant au paiement des sommes dues par un assureur au titre de ses obligations de droit privé, et à raison du fait dommageable commis par son assuré, alors même que l’appréciation de la responsabilité de cet assuré dans la réalisation du fait dommageable relève du juge administratif.
Quid de l’action en garantie d’un constructeur contre le fournisseur / et ou le fabricant d’une coobligée ?
Dans un arrêt du 21 juin 2022, la Cour administrative d’appel de PARIS a considéré qu’il appartient au seul juge judiciaire de connaître des actions en garantie formées contre le fournisseur (CAA de Paris, 3e chambre, 21 juin 2022, n°19PA00750).
En l’espèce, une société avait conclu, pour la fourniture des pierres utilisées pour l’exécution des travaux de réaménagement d’un port, un contrat de sous-traitance relevant du droit privé avec un entrepreneur titulaire du marché public. Eu égard notamment aux caractéristiques des pierres commandées, la juridiction a considéré que cette société avait eu la qualité de simple fournisseur, et ne pouvait dès lors être regardée comme ayant participé à l’exécution des travaux publics litigieux. Par suite, il appartenait au seul juge judiciaire de connaître des actions en garantie formées contre ladite société.
C’est également la position de la Cour administrative d’appel de NANTES (CAA de Nantes, 4ème chambre, 8 avril 2022, n°20NT03819).
Ainsi, sauf à démontrer que le fournisseur à réellement participé à l’exécution de travaux publics et ne peut alors avoir la qualité de « simple fournisseur », l’appel en garantie d’un constructeur contre le fournisseur / et ou le fabricant d’une coobligée relève de la compétence du juge judiciaire.